6 Analyse de tendance
Les changements climatiques se manifestent par une modification des variables statistiques utilisées pour caractériser le climat, la plus connue étant la moyenne (p. ex. température moyenne ou encore le total de précipitations moyen). On dira alors que la série est ‘non stationnaire’ si ces variables changent avec le temps (voir la fiche 3). Les changements climatiques se manifestent le plus souvent par une augmentation progressive de la moyenne, mais d’autres variations sont possibles, par exemple, une augmentation de la variabilité.
Les séries de variables climatiques sont assimilées à des séries aléatoires (voir la fiche 5). Un nombre infini de séries est possible, possédant toutes les mêmes caractéristiques statistiques (p. ex. même moyenne). Il est donc réaliste de générer fortuitement une série aléatoire avec une tendance. Afin d’évaluer si une tendance dans une série n’est pas simplement le fruit du ‘hasard’ ou, au contraire, résulte d’une évolution des caractéristiques statistiques, un test de tendance est appliqué. Plusieurs tests de tendance ont été développés par le passé, le plus connu étant le test de Mann-Kendall.
Le test de Mann-Kendall permet de déterminer si la tendance détectée est statistiquement significative. Soit une série de n valeurs \(\{x_1, x_2, …, x_n\}\), le test de Mann-Kendall permet de vérifier l’hypothèse nulle H₀ qu’aucune tendance monotone n’est présente dans la série ; l’hypothèse alternative H₁ est que la série présente une tendance monotone. La statistique S du test est calculée :
\[S = \sum_{i = 1}^{n - 1}{\sum_{j = i + 1}^{n}{sgn\left( x_{j} - x_{i} \right)}}\]
\[sgn(\phi) = \left\{ \begin{array}{r} + 1\text{ si }\phi > 0 \\ 0\text{ si }\phi = 0 \\ - 1\text{ si }\phi < 0 \end{array} \right.\]
La statistique S correspond au décompte du nombre de fois où les paires de valeurs de la série sont croissantes, égales ou décroissantes. Ainsi plus la série compte de paires croissantes \(x_i < x_j\), plus S est positif et grand, alors que plus la série compte de paires décroissantes \(x_i > x_j\), plus S sera négatif. S = 0 correspond au cas où il n’y a pas de croissance ou de décroissance nette. Sous les conditions que les valeurs de la série sont indépendantes et identiquement distribuées, que S est normalement distribué, que la moyenne de cette distribution est nulle et qu’il n’y a pas d’égalité (\(x_i \neq x_j\forall i, j\)), on peut montrer que la variance V est donnée par1 :
\[V(S) = \frac{n(n - 1)(2n + 5)}{18}\]
La statistique \(Z_{MK}\) du test est ensuite calculée :
\[Z_{MK} = \left\{ \begin{array}{r} \frac{(S - 1)}{\sqrt{V(S)}}\text{ si }S > 0 \\ 0\text{ si }S = 0 \\ \frac{(S + 1)}{\sqrt{V(S)}}\text{ si }S < 0 \end{array} \right.\]
Une valeur positive de \(Z_{MK}\) suggère une tendance à la hausse, alors qu’une valeur négative de \(Z_{MK}\) est associée à une tendance à la baisse.
Si \(Z_{MK} > 0\), l’hypothèse nulle H₀ d’une absence de tendance monotone est comparée à l’hypothèse alternative H₁ d’une tendance monotone croissante. Ainsi, pour un seuil α, on rejette l’hypothèse H₀ au profit de l’hypothèse d’une tendance à la hausse si \(Z_{MK} > Z_{(1 - \alpha)}\), où \(Z_{(1 - \alpha)}\) est le (1 - α)ᵉ percentile de la loi normale centrée réduite2.
Lorsque \(Z_{MK} < 0\), l’hypothèse nulle H₀ d’une absence de tendance monotone est comparée à l’hypothèse alternative H₁ d’une tendance monotone décroissante. Ainsi, pour un seuil α, on rejette l’hypothèse H₀ au profit de l’hypothèse d’une tendance à la baisse si \(Z_{MK} < -Z_{(1 - \alpha)}\). Pour \(\alpha = 0.05\), où on a \(Z_{(1 - \alpha)} = 1.645\), on rejette H₀, sachant qu’il y a une probabilité de 5% que cette série soit obtenue alors que H₀ est vrai3.
L’expression pour V(S) est différente lorsqu’il y a égalité entre valeurs de la série (Hamed 2008)↩︎
Attention : on ne peut jamais accepter H₀ car on ne peut jamais rejeter H₁.↩︎
Un débat a cours depuis plusieurs années quant au seuil α à considérer pour rejeter l’hypothèse nulle et sur l’interprétation à donner au seuil de significativité. Sans entrer dans les détails, le lecteur intéressé par ces questions peut consulter Colquhoun (2014).↩︎